Les règles de financement durable : comment l’Union Européenne peine à trouver le bon compromis

Établir des règles de financement durable est une tâche de longue haleine sur laquelle l’Union européenne travaille depuis plusieurs années avec quelques bouleversements. L’élargissement du règlement SFDR, qui prendra une nouvelle dimension à partir de janvier 2023, indique les difficultés de l’exercice. Le Sustainable Finance Disclosure Regulation oblige les acteurs financiers (sociétés de gestion, banques, assureurs) à communiquer de manière plus transparente et les oblige à classer leurs fonds en différentes catégories selon qu’ils promeuvent une ou plusieurs caractéristiques ESG (article 8) ou affichent un objectif d’investissement durable ( article 9). Dans ce second cas, le plus ambitieux, il sera possible par exemple d’avoir un impact en matière de transition énergétique, d’économie circulaire ou encore de préservation de la biodiversité. Toutes les autres mesures sont appelées « article 6 ». Mais ce classement n’est pas du tout évident, tant il n’y a pas de clarté dans le texte « niveau 1 », entré en vigueur en mars 2021. Et le « niveau 2 », qui entrera donc en vigueur en janvier, change la donne.

Des exigences plus strictes

 » Le niveau d’exigence augmentera lorsque les règles concernant les documents qui doivent être préparés par les gestionnaires de fortune et qui contiendront beaucoup d’informations, comme le sujet choisi, le taux minimal de conformité à la classification, entreront en vigueur. auquel le fonds s’est engagé, la proportion minimale d’investissement durable dans ce produit… explique Laurence Caron-Habib, Responsable des Relations Publiques de BNP Paribas AM.

Une définition plus restreinte des fonds de l’article 9 est en train d’émerger. Le législateur européen s’attend à terme à ce que ces produits soient exposés à 100% à des investissements durables, hors instruments de couverture et hors trésorerie. Le sort des entreprises « en transition » se dessine. Cependant, de nombreux acteurs considéraient par exemple que le respect des objectifs de l’Accord de Paris (une trajectoire conduisant à moins de 2°C de réchauffement climatique par rapport aux niveaux préindustriels) était suffisant pour qualifier ces mesures au titre de l’article 9.

Reclassements de séries

Suite à cette nouvelle interprétation plus exigeante, à compter du 1er janvier 2023, 47 fonds « Article 9 » d’Axa IM passeront en catégorie « Article 8 ». D’autres sociétés de gestion ont également dû s’adapter, Amundi, le leader européen, annonçant la dégradation d’une centaine de ses fonds ; Les recherches de Morningstar font également état de reclassifications de fonds pour NN IP, Deka, Neuberger Berman et d’autres.

Un défi à la définition

Jean-Benoit Gambet, co-fondateur du cabinet de conseil Moonshot, accompagne les sociétés de gestion souhaitant développer des fonds Article 9. Il estime qu’il y a eu des abus, notamment de la part de très grands gestionnaires d’actifs. Quand on a tout le MSCI dans son portefeuille, quand on n’a pas de thématique précise, on peut facilement être accusé de greenwashing. « . A ce stade, la question clé demeure pour tous les acteurs financiers.  » Qui peut dire ce qu’est un investissement durable ? Le défi pour la Commission européenne sera de ne pas formuler une définition trop restrictive de la durabilité. Je suis d’avis que toutes les sociétés doivent pouvoir être durables une fois entrées dans la transition écologique. ajoute Jean-Benoit Gambet, qui conseille les sociétés de gestion. fixer des objectifs à long terme qui correspondent à leur message. Basée sur une grille ESG de 150 critères, la note globale ne veut rien dire. Tu dois choisir ton combat, un sujet clair « .

Ces réflexions et ajustements du SFDR sont certainement source de confusion et de débat. Mais impossible de nier le caractère déterminant de cette réglementation, qui relève davantage de la transparence que de l’étiquetage. Selon les données de Morningstar, les fonds de l’article 9 ont enregistré des entrées de 12,6 milliards d’euros au troisième trimestre, tandis que les sorties de l’article 8 étaient de 28,7 milliards d’euros et la catégorie de l’article 6 de plus de 62 milliards d’euros. On voit donc que les enjeux sont élevés.

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